11.5.10

Impact de la nouvelle directive SMAV sur le placement de produit

Des marques pour le meilleur des mondes ?

Pendant que les tout derniers smartphones, ordinateurs, voitures de rêve et dieu sait quel autre gadget de luxe font leur début sur les écrans de cinéma à Cannes, nous pouvons être sûrs que les législateurs européens ont eu leur mot à dire avant que l'image ne puisse être projetée. À la date limite de décembre 2009, tous les pays de l’Union européenne étaient censés avoir transposé la Directive Services de médias audiovisuels (SMAV) dans leur législation nationale. Ce nouvel instrument juridique paneuropéen, qui remplace l'ancienne Directive sur la télévision sans frontières (TSF), prévoit de nouvelles dispositions relatives au placement de produit. C’est ce nouvel ensemble de règles que l'Observatoire européen de l’audiovisuel (qui fait partie du Conseil de l'Europe à Strasbourg) analyse dans sa nouvelle publication IRIS plus :
Le placement de produit dans les productions audiovisuelles européennes
Christina Angelopoulos, chargée de recherche à l'Institut du droit de l’information (IViR) de l’Université d’Amsterdam (IViR), déclare sans ambages que les dispositions de la nouvelle Directive relatives au placement de produit obéissent à une logique de « libéralisation totale ayant pour but de renforcer la position de l'industrie audiovisuelle européenne face à ses concurrents ». Compte tenu de ce que l'auteur considère comme « des tabous européens profondément ancrés contre la coexistence de contenus rédactionnels et commerciaux », la Directive finale est cependant décrite comme « une prohibition symbolique encadrée par des exceptions libérales ».
Prenant un certain recul dans le temps, le rapport passe en revue le placement de produit à l’époque de la Directive TSF. Le statut légal du placement du produit sous l'ancienne législation était totalement flou du fait que la TSF soutenait les principes de la séparation des contenus commerciaux et rédactionnels, ainsi que de l'identification nette de la publicité. Le placement du produit, par sa nature même, implique le mélange de produits de marque et de contenus rédactionnels, ce qui rend presque inapplicable le principe de séparation.
En effet, le chapitre suivant intitulé La feinte de la Directive SMAV : le placement de produit échappe au principe de séparation explique comment la nouvelle législation limite strictement le principe de séparation à la publicité télévisuelle et au téléachat, le principe d'identification étant retenu dans un souci de transparence pour les spectateurs. Pourvu d’un cadre réglementaire officiel, le placement du produit devient possible sous la nouvelle Directive SMAV.
Le rapport fournit ensuite une analyse complète de la réglementation du placement de produit dans la Directive SMAV. Lors de son adoption, les Etats membres ont été encouragés par la Commission européenne à les transposer dans leur législation nationale avec une certaine souplesse, tout en conservant la possibilité législative d'adopter ultérieurement des règles plus strictes si le besoin s’en fait sentir. En pratique, la plupart des nations en sont arrivées à permettre le placement du produit « dans des limites souvent un peu plus strictes mais encore généreuses ». Christina Angelopoulos met aussi l'accent sur une liste de genres compatibles au placement du produit, comme par exemple les « œuvres cinématographiques » ou les « programmes de sport », avant de souligner les quatre principes gouvernant le placement licite de produit :
• éviter l'influence abusive des programmes contenant du placement de produit sur l'indépendance rédactionnelle du fournisseur de service ;
• éviter l'effet promotionnel abusif qui encouragerait directement à l'achat ou à la location de biens ou de services ;
• éviter la prédominance abusive donnée à des produits, des services ou des marques commerciales ;
• veiller au respect de l'obligation d'informer le public de l’existence du placement de produit au moyen de logos d’information.
Christina Angelopoulos conclut son rapport en observant la relation entre le placement de produit et d’autres concepts de la Directive SMAV : en matière de parrainage, par exemple, la concomitance du placement de produit et du parrainage est licite au sein d'un même programme, la différence étant que le parrainage maintient une séparation entre les contenus publicitaires et rédactionnels, contrairement au placement de produit. On notera avec intérêt que la France, dans sa transposition de la Directive SMAV, a choisi de rendre illicite cette concomitance.
L'article de fond conclut que le mérite de la Directive SMAV est d’avoir fourni « la règlementation explicite du placement de produit » dans les productions audiovisuelles, de telle sorte que « compte tenu de la conscience publicitaire accrue du public dans l'environnement complexe des medias modernes, la transparence semble s’être inscrite à l’ordre du jour. »
La rubrique Reportages apporte des précisions récentes et explicites sur l'état actuel du placement de produit dans plusieurs pays d'Europe ayant respecté la date limite de transposition de la Directive SMAV. Enfin, la rubrique Zoom de la nouvelle publication fournit des informations actualisées sur la législation du placement de produit pays par pays, rassemblées par l’European Platform of Regulatory Authorities (Plateforme européenne des instances de régulationl). Le rapport donne une vue d'ensemble, datée d'avril 2010, de l'état de la transposition des dispositions de la Directive relatives au placement de produit à travers l'Europe. Des liens vers les législations nationales en vigueur sont indiqués au cas par cas.
Une vue d'ensemble succincte et extrêmement précieuse de la législation du placement de produit en Europe.

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